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Débit de boissons : quelles licences pour quelles activités ?

Date de publication : 21.10.24

Création d'entrepriseJuridiqueArtisan - commerçant - TPECafé Hôtel et RestaurantCréateur

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L’entrepreneur souhaitant exercer une activité impliquant la vente de boissons alcoolisées, accompagnant un repas ou non, sur place ou à emporter, doit impérativement prendre connaissance des différentes « licences » et des autorisations qu’elles confèrent.

Bars, restaurants, supermarchés, épiceries… Dès lors que la question de la vente de boissons alcoolisées se pose, la législation n’est jamais loin. Leur mise en vente devra systématiquement s’effectuer dans les limites d’un cadre légal strict entourant les activités de débit de boissons.

La législation actuelle résulte d’une longue évolution marquée principalement par la nécessité de trouver un équilibre entre les enjeux de santé publique, les enjeux économiques et sociaux liés à la consommation, et une certaine culture en France relative à l’usage de boissons alcoolisées.

Les activités de débit de boissons sont segmentées selon la teneur en alcool des boissons vendues, la destination de l’établissement vendeur (bar, restaurant, bar-restaurant, boite de nuit, food-truck, supermarché, épicerie…) et le mode de consommation de la boisson (sur place ou à emporter).

Taux d’alcool et catégorisation des boissons alcoolisées

L’article L. 3321-1 du Code de la santé publique catégorise les boissons en vue de la réglementation de leur fabrication, de leur mise en vente et de leur consommation. Depuis le 1er janvier 2016, les boissons sont réparties en quatre catégories :

  • Groupe n°1 – Boissons sans alcool : eaux minérales ou gazéifiées, jus de fruits ou de légumes non fermentés ou ne comportant pas, à la suite d’un début de fermentation, de traces d’alcool supérieures à 1,2 degré, limonades, sirops, infusions, lait, café, thé, chocolat.
  • Groupe n°3 – Boissons fermentées non distillées et vins doux naturels : vin, bière, cidre, poiré, hydromel, auxquelles sont joints les vins doux naturels, ainsi que les crèmes de cassis et les jus de fruits ou de légumes fermentés comportant de 1, 2 à 3 degrés d’alcool, vins de liqueur, apéritifs à base de vin et liqueurs de fraises, framboises, cassis ou cerises, ne titrant pas plus de 18 degrés d’alcool pur.
  • Groupe n°4 – Rhums, tafias, alcools provenant de la distillation des vins, cidres, poirés ou fruits, et ne supportant aucune addition d’essence ainsi que liqueurs édulcorées au moyen de sucre, de glucose ou de miel à raison de 400 grammes minimum par litre pour les liqueurs anisées et de 200 grammes minimum par litre pour les autres liqueurs et ne contenant pas plus d’un demi-gramme d’essence par litre.
  • Groupe n°5 – Toutes les autres boissons alcooliques.

NB : Avant 2016, il existait un groupe n°2 mais celui-ci a été fusionné au groupe n°3.

Qu’est-ce qu’un débit de boissons ?

Un débit de boissons au sens de la loi s’entend de tout lieu (même exploité temporairement) dans lequel il est mis à la vente des boissons alcoolisées pour consommation immédiate ou à emporter.

Il peut s’agir :

  • d’un établissement permanent dédié à cette activité (bar, restaurant)
  • d’un lieu accessoire permanent à une activité permanente connexe : dans un hôtel par exemple pour la partie bar et restaurant
  • d’un lieu accessoire permanent à une activité sans lien direct : coin bar dans une librairie, ou dans un magasin d’une autre nature par exemple
  • d’un lieu ouvert temporairement pour cette activité : buvette temporaire pour un lieu de spectacle ou une association par exemple.

Dès qu’il est mis en vente des boissons alcoolisées dont la consommation pourra être immédiate ou à emporter, la réglementation trouvera à s’appliquer. Il convient d’être particulièrement vigilant notamment lorsqu’on organise un évènement ponctuel à l’occasion duquel des boissons alcoolisées seront vendues.

Restauration et débit de boissons à consommer sur place : quelles possibilités ?

La vente de boissons non alcoolisées (groupe n°1) est libre. Elle ne fait l’objet d’aucune restriction particulière au titre du Code de la santé publique, quelle que soit la nature de l’établissement les proposant à la vente.
La vente, sur place, de boissons alcoolisées ayant un taux inférieur ou égal à 18° d’alcool (groupe n°3) ou présentant un taux supérieur à 18° d’alcool (groupes n°4 et 5) est soumise à restriction. On parle alors de « licences », qui peuvent adopter des formes différentes selon le type d’activité exercée.

Le Code de la santé publique différencie les « débits de boissons à consommer sur place » (cafés, bars, pubs, boites de nuit…) et les restaurants (Articles L. 3331-1 et L. 3331-2).

Activité de débit de boissons à consommer sur place :

Il s’agît dans ce cas précis de la consommation de boissons alcoolisées seules, sans consommation d’un repas (bar, pub…)

  • La vente de boissons alcoolisées à consommer sur place appartenant au groupe n°3, présentant donc un taux inférieur ou égal à 18° d’alcool, est soumise à la délivrance de la « Licence III », dite « licence restreinte ».
  • La vente de boissons alcoolisées à consommer sur place appartenant aux groupes n°4 et n°5, présentant donc un taux supérieur à 18° d’alcool, est soumise à la délivrance de la « Licence IV », dite « grande licence » ou « licence de plein exercice ».

Activité de restaurant :

Dans ce cas de figure, il s’agît de boissons alcoolisées consommées sur place, mais seulement à l’occasion des principaux repas (restaurants, gîtes, tables d’hôtes) et comme accessoires de la nourriture (planches apéritives, snacking).

• La délivrance de la « petite licence restaurant » permet la vente des boissons alcoolisées appartenant au groupe n°3, présentant donc un taux inférieur ou égal à 18° d’alcool.

• La délivrance de la « licence restaurant » permet la vente de boissons alcoolisées appartenant aux groupes n°4 et n°5, présentant donc un taux supérieur à 18° d’alcool.

Il est donc primordial de bien différencier les licences permettant l’activité de débit de boisson à consommer sur place et les licences délivrées pour la vente d’alcool dans le cadre d’un repas préparé par le restaurateur.

Activité de bar-restaurant :

La possession d’une petite licence restaurant ou d’une licence restaurant ne permet pas de mettre à la vente des boissons alcoolisées à consommer sur place en dehors du cadre du repas. En revanche, la possession d’une licence III ou IV seule permet de s’exonérer de la licence restaurant pour vendre des boissons alcoolisées pendant les repas.

NB : La possession d’une licence autorisant la vente de boissons alcoolisées appartenant aux groupes n°4 et n°5 de l’article L. 3321-1 du Code de la santé publique autorise également la vente des boissons relevant du groupe n°3.

Débit de boissons à emporter : licences et modalités spécifiques

Il est possible pour tous les établissements possédant une licence à consommer sur place (licence III / licence IV) ou une licence de restaurant (licence petit restaurant / licence restaurant) de vendre à emporter les boissons correspondant à la catégorie de leur licence (Article L. 3331-3 du Code de la santé publique).

Au-delà de ces cas, tous les établissements souhaitant exercer une activité de vente à emporter de boissons alcoolisées doivent posséder une licence permettant spécifiquement ce mode de vente.

Entrent dans cette catégorie toutes les activités procédant à la vente à emporter de ces boissons, quelles que soient l’envergure et les techniques de vente (supermarchés, épiceries, cavistes, food-truck, vente à distance, e-commerce…) :

  • La vente à emporter de boissons alcoolisées appartenant au groupe n°3, présentant donc un taux inférieur ou égal à 18° d’alcool, est soumise à la délivrance de la « petite licence à emporter ».
  • La vente à emporter de boissons alcoolisées appartenant aux groupes n°4 et n°5, présentant donc un taux supérieur à 18° d’alcool, est soumise à la délivrance de la « licence à emporter ».

NB : La licence à emporter, portant sur les boissons des groupes n°4 et n°5, n’est pas ouverte aux activités de food-truck. Seules les boissons présentant un taux inférieur ou égal à 18° d’alcool peuvent être mises en vente par ces exploitants (sous réserve de l’obtention de la petite licence à emporter).

Conformément aux dispositions de l’article L. 3331-4 du Code de la santé publique, la distribution de boissons par le moyen d’appareils automatiques permettant la consommation immédiate est considérée comme une vente à consommer sur place.

Attention à la dégustation sur place :
La vente à emporter de bouteilles d’alcool dans un établissement dédié nécessite naturellement l’obtention d’une licence à emporter (ou petite licence à emporter pour les caves à vin). Cependant, si l’établissement propose des dégustations sur place, la licence débit de boissons à consommer sur place deviendrait nécessaire (il semblerait que certaines mairies fassent la distinction entre les dégustations gratuites et onéreuses).

Toutefois, pour les vignerons proposant des dégustations sur leur lieu d’exploitation, la question n’est pas véritablement tranchée. Il est conseillé pour ces derniers de se rapprocher de la mairie pour demander si l’obtention d’une licence est nécessaire ou non et dans le doute d’en solliciter une.

Restrictions et quotas géographiques des licences III et licences IV

Dans une commune, une licence III ne peut être délivrée que si la proportion d’établissements déjà titulaires d’une licence III ou IV ne dépasse pas un établissement pour 450 habitants. Il convient donc d’être vigilant sur ce point avant d’entamer tout projet d’établissement de vente de boissons alcoolisées.

Le Code de la santé publique interdit l’ouverture d’une nouvelle licence IV (article L. 3332-2). Ainsi, pour obtenir une licence IV, il convient de procéder à son acquisition ou son transfert.

Le transfert de licence peut être effectué au sein d’un même département, sur autorisation du préfet, ou vers un département limitrophe, sous réserve de l’obtention de l’autorisation du préfet du département où est situé l’établissement bénéficiant du transfert.

Il existe également des restrictions dans les zones où sont implantées certains établissements sportifs, hospitaliers, scolaires ou de loisirs visés par des arrêtés préfectoraux.

Toutefois, au sein des grandes villes, les transferts de licence ne sont que rarement autorisés. Les mairies peuvent déterminer des zones vers lesquelles aucun transfert ne peut être effectué, pour des raisons de proximité entre les établissements disposant d’une licence III ou IV. Cette situation est particulièrement observée dans les centres-villes des métropoles, où les bars et pubs sont souvent présents en grand nombre. Il convient de se renseigner auprès des mairies sur les conditions et possibilités d’obtention ou de transfert d’une licence.

A noter que l’ouverture de débits de boisson temporaires peut être autorisée par la mairie dans le cadre d’évènements spécifiques (foires, fêtes…).

Comment obtenir sa licence quand on veut exploiter un débit de boissons ? Procédure et spécificités

Le permis d’exploitation

L’obtention d’une licence requiert de détenir au préalable un permis d’exploitation délivré après la réalisation d’une formation en présentiel, d’au moins 20 heures, réparties sur 2 jours et demi.

Ces formations sont dispensées par des organismes agréés, différents selon que la vente se fasse sur place ou à emporter la nuit. Elles portent sur la prévention des risques liés à la consommation d’alcool, les exigences de sécurité, d’hygiène et de santé publique, ainsi que sur la protection des populations (en particulier des mineurs).

Le permis d’exploitation est délivré pour une durée de 10 ans, renouvelable à échéance en suivant une formation de 6 heures.

Déclaration d’ouverture et récépissé d’obtention de la licence

Une fois le permis d’exploitation obtenu, l’entrepreneur doit se rapprocher de sa mairie pour effectuer une déclaration préalable d’ouverture, au moins 15 jours avant l’ouverture effective de l’établissement.

A noter que l’ouverture d’un établissement au public sans disposer de la licence de débit de boissons correspondant à la catégorie nécessaire peut être une cause de fermeture définitive de l’établissement et d’interdiction à vie pour le dirigeant ou exploitant de reprendre une exploitation d’un débit de boissons outre des sanctions pénales dissuasives. En outre, l’ouverture sans licence peut également être une cause de résiliation du bail consenti à l’entreprise pour non-respect des règles de police. Il est donc impératif de s’assurer du respect de cette réglementation avant toute ouverture.

A noter qu’une licence peut également être obtenue via une déclaration de mutation, en cas de changement de l’exploitant d’un établissement – ou une déclaration de translation, lorsque le même exploitant souhaite transférer sa licence à un autre établissement lui appartenant, sous conditions.

Une fois la procédure terminée, l’exploitant reçoit un récépissé attestant que ce dernier est bien possession d’une licence.

La licence est délivrée à durée indéterminée. En cas d’arrêt d’activité volontaire de l’exploitant, la licence est annulée après 5 ans d’inexploitation.

NB : C’est le permis d’exploitation qui donne le droit à l’exploitant de vendre des boissons alcoolisées et non la licence. La licence est rattachée à l’établissement où sont vendues les boissons.

Pour conclure …

Ainsi, tout entrepreneur souhaitant exploiter un débit de boisson doit absolument déterminer exhaustivement les contours de son activité avant de démarrer son projet. Chaque licence couvrant un pan déterminé et précis du débit de boisson, ce dernier doit être vigilant pour ne pas se retrouver bloqué d’office par la législation en vigueur.

Ne sont pas rares les cas d’entrepreneurs ayant engagé des frais au préalable (honoraires, prêts bancaires…) et s’étant retrouvés dans l’impossibilité de démarrer leur activité à la suite d’un refus d’obtention ou de transfert de la licence nécessaire.

A propos de L'auteur

Clément Bouchut

Juriste

Clément Bouchut est juriste en droit des sociétés. Il accompagne les clients de l’agence de Villeurbanne et plus particulièrement les professionnels du secteur de la restauration.

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