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20 questions / réponses sur l’emploi des salariés étrangers
Date de publication : 20.03.25

Recruter des salariés étrangers, dans un contexte de pénurie de talents et d’internationalisation croissante, représente une opportunité stratégique pour de nombreuses entreprises tout en soulevant des questions complexes en matière de droit du travail et de régulation administrative.
Pour vous aider à y voir plus clair, nous avons recensé ici les principales questions que vous pouvez vous poser, en tant qu’employeur, sur ce sujet. Nos experts en droit du travail et gestion d’entreprise y répondent.
1 – Quelles sont les obligations administratives pour employer des salariés étrangers résidant à l’étranger ? Quelles démarches doit accomplir l’employeur pour faciliter l’obtention d’un titre de séjour à un travailleur étranger ?
Tout dépend de la situation du salarié étranger.
Si le salarié réside déjà en France :
- Il faut vérifier si une autorisation de travail est nécessaire
- Si elle n’est pas nécessaire, faire authentifier le titre de séjour auprès de la préfecture et vérifier sa validité
- Si elle est nécessaire faire la demande auprès de l’ANEF
Pour tous les titres de séjour ayant un motif professionnel, une autorisation est nécessaire pour chaque nouveau contrat de travail.
Dès réception de l’autorisation, le salarié peut travailler.
Si le salarié réside à l’étranger, les démarches sont les suivantes :
L’employeur doit vérifier si une autorisation de travail est nécessaire. Certains titres, comme le Passeport Talent, ne nécessitent pas cette autorisation.
Si elle est requise, la demande doit être faite via l’ANEF (Administration Numérique pour les Étrangers en France) et l’employeur doit justifier de l’opposabilité de l’emploi (prouver qu’aucun candidat local n’a été trouvé, sauf pour les métiers en tension). Légalement, le délai d’instruction est de 2 mois. Mais en pratique le délai est en général de 2 à 5 semaines (cela peut varier selon la complexité de la demande et le volume de demandes).
Une fois l’autorisation obtenue, le salarié étranger doit demander un visa de long séjour auprès du consulat français de son pays. Le délai est en général de 2 à 4 semaines après dépôt du dossier.
En complément, il existe de nombreux accords bilatéraux entre la France et certains pays étrangers, notamment pour faciliter la venue de travailleurs et/ou faciliter la mobilité des jeunes (jeunes professionnels, vacances-travail).
En général, ces accords prévoient :
- Des règles spécifiques en matière de regroupement familial
- Un élargissement de la liste des emplois pour lesquels l’embauche de salariés étrangers peut être réalisée sans avoir à justifier de l’opposabilité de l’emploi et de la publication de l’offre d’emploi pendant 3 semaines (ex : Burkina Faso, Cameroun, Cap Vert, Congo, Géorgie, Ile Maurice, Sénégal, Tunisie)
- Un accès à la carte de résident après 3 ans de séjour au lieu de 5.
L’accord franco-marocain du 9 octobre 1987 n’offre pas d’avantages spécifiques par rapport aux autres salariés étrangers. Les ressortissants marocains doivent suivre les mêmes procédures administratives. Toutefois, une particularité existe : après trois ans de séjour ininterrompu en France sous un titre de séjour « Salarié », les salariés marocains peuvent obtenir une carte de résident de 10 ans, au lieu des 5 ans requis dans le régime général.
À l’inverse, l’accord franco-tunisien introduit une flexibilité accrue en élargissant la liste des métiers accessibles sans opposabilité de la situation de l’emploi. Parmi ces métiers figurent ceux de l’hôtellerie et de la restauration, qui ne font pas encore partie de la liste officielle des métiers en tension définie par l’arrêt du 1er avril 2021.
2 – Dans quel(s) cas de figure doit-on faire une demande d’autorisation de travail pour des salariés étrangers ?
En pratique, un employeur doit formuler une demande d’autorisation de travail dans les cas suivants :
- En cas d’embauche d’un travailleur étranger résident hors de France
- En cas de titre de séjour « salarié » : carte de séjour temporaire (CST) / carte de séjour pluriannuelle (CSP)
- En cas de carte de séjour temporaire « travailleur temporaire »
- En cas de récépissé de renouvellement de titre de séjour portant la mention « autorise son titulaire à travailler » (sauf si c’est le même employeur)
- En cas de CST ou CSP « étudiant » ou « étudiant -programme de mobilité » pour une activité salariée d’une durée supérieure à 964h/an.
3 – Quelles autorisations de travail et titres de séjours permettent de travailler en France ainsi que les procédures pour les obtenir ?
Il existe une vingtaine de titres de séjour, chacun soumis à des conditions et procédures spécifiques pour leur obtention. En règle générale, les démarches s’effectuent auprès de la préfecture ou via la plateforme en ligne de l’ANEF.
Certains titres permettent à leur titulaire de travailler sans formalité supplémentaire pour l’employeur, comme la carte de résident 10 ans, la carte de séjour « vie privée et familiale », la carte de séjour étudiant, la carte de séjour « recherche d’emploi ou création d’entreprise », le passeport-talent ou encore la carte de séjour salarié détaché.
En revanche, d’autres titres ne confèrent pas automatiquement un droit au travail. Dans ce cas, l’employeur doit impérativement obtenir une autorisation préalable auprès de la préfecture via l’ANEF avant d’embaucher le salarié concerné.
4 – Y a-t-il des spécificités pour employer des salariés étrangers dans le secteur pétrolier ?
Il n’existe pas de spécificité particulière pour le secteur pétrolier en matière d’autorisation de travail des salariés étrangers : la question reste la même que dans tout autre domaine, à savoir si le travailleur étranger doit en obtenir une.
Cependant, les plates-formes offshore sont soumises à la juridiction de l’État côtier pour toutes les activités de prospection et d’exploitation. En pratique, le cadre juridique est plus complexe. Une plate-forme pétrolière appartient généralement à un propriétaire qui la loue, avec son personnel, à une entreprise d’exploitation. Cette dernière sous-traite ensuite certaines tâches à des entreprises spécialisées selon leurs domaines d’expertise.
Ainsi, en plus du contrat principal, plusieurs contrats de prestation de services peuvent être conclus pour des activités comme l’avitaillement, l’entretien ou encore le transport de matériel et de personnel. Ce fonctionnement engendre un enchevêtrement de règles juridiques et une multitude de relations contractuelles, rendant la réglementation plus difficile à appréhender.
5 – Y a-t-il des spécificités pour employer des salariés étrangers dans la filière équine ?
Les autorisations de travail sont accordées en fonction de la personne et non de son activité. Ainsi, les démarches restent identiques pour tous les travailleurs étrangers.
Dans ce contexte, il peut être pertinent d’opter pour un Passeport Talent, qui permet d’employer des salariés étrangers dont les compétences justifient une autorisation de travail. Ce statut s’appuie sur plusieurs critères, notamment :
- Une renommée nationale ou internationale,
- Un intérêt pour la discipline ou un projet structuré,
- L’absence de trouble à l’ordre public.
Une particularité s’applique toutefois dans le domaine équestre : le cheval doit posséder un passeport FEI (Fédération Équestre Internationale). Ce document est obligatoire pour participer aux compétitions internationales, sauf pour les épreuves dites « Low Level » qui ont lieu dans le pays de résidence du cheval. Ce passeport est requis tant pour les chevaux que pour les cavaliers.
6 – Quels sont les droits et obligations des salariés étrangers européens amenés à travailler pour des entreprises en France dans les métiers en tension ?
Un travailleur ressortissant de l’Union européenne n’a pas besoin d’une autorisation de travail spécifique pour exercer une activité en France.
La question relève donc principalement du lieu de résidence de l’employeur :
- Si l’employeur est établi en France, le salarié européen est soumis aux mêmes règles qu’un travailleur français.
- Si l’employeur est basé dans un autre pays de l’Union européenne, le salarié doit être en situation de détachement communautaire et répondre aux conditions spécifiques permettant à un employeur européen de faire travailler un salarié en France.
7 – Est-il possible d’employer des salariés étrangers en situation irrégulière via un visa de travail ou un autre dispositif ?
Non.
Une personne en situation irrégulière ne peut pas bénéficier d’une autorisation de travail. Si l’on souhaite l’embaucher il est donc nécessaire d’avoir :
- l’autorisation de séjourner sur le territoire Français
- une autorisation de travail.
8 – Comment fonctionne la taxe pour l’embauche d’un salarié étranger ?
Lorsque l’autorisation de travail est accordée pour l’emploi d’un salarié étranger, l’employeur doit payer une taxe. Cette taxe ne s’applique pas aux ressortissants européens puisqu’ils bénéficient d’une liberté de circulation et d’établissement en France.
La taxe est uniquement due à l’occasion de la 1ère délivrance du titre de séjour du salarié ou du travailleur détaché.
Le montant de la taxe due par l’employeur est fixé en fonction de la durée du contrat de travail, du niveau de rémunération et du type de contrat de travail du travailleur étranger ou du salarié détaché.
Pour un contrat de travail supérieur à 3 mois et inférieur à 12 mois, le montant de la taxe varie selon le salaire mensuel brut versé.
Montant de la taxe en fonction du salaire
Montant du salaire mensuel brut | Montant de la taxe |
---|---|
Inférieur ou égal à 1 801,80 € (Smic) | 74 € |
Entre 1 801,80 € et 2 702,70 € | 210 € |
Supérieur à 2 702,70 € | 300 € |
9 – Comment obtenir rapidement un rendez-vous en préfecture ?
Actuellement, la majorité des démarches sont dématérialisées, ce qui rend impossible toute accélération du processus. Par conséquent, solliciter un « ami » au sein de l’administration n’a plus d’utilité.
Le meilleur conseil que l’on puisse donner est de constituer un dossier complet dès la première demande pour éviter tout rejet par l’administration.
10 – Faut-il systématiquement demander un accord de la préfecture, même avec un titre de séjour ou visa permettant de travailler ?
Obtenir une autorisation n’est pas toujours nécessaire.
Certaines catégories d’étrangers bénéficient d’un titre de séjour qui leur permet d’exercer une activité professionnelle sans que leurs conditions d’emploi soient examinées par l’administration.
Ces titres combinent à la fois le séjour et le travail.
Pour les titres et documents de séjour mentionnés à l’article R. 5221-2 du Code du travail, la demande d’autorisation de travail n’est pas requise.
Cela concerne une quinzaine de titres, notamment :
- les ressortissants des États membres de l’Union européenne, de l’Espace économique européen et de la Confédération suisse, ainsi que les membres de leur famille titulaires d’une carte de séjour portant la mention « membre de la famille d’un citoyen de l’Union »
- les salariés détachés selon les articles L. 1262-1 et L. 1262-2, travaillant régulièrement et habituellement pour un employeur établi dans un État membre de l’Union européenne, un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou la Confédération suisse
- les titulaires de la carte de résident
- les titulaires de la carte de séjour temporaire « vie privée et familiale » ou du visa de long séjour valant titre de séjour
- les titulaires de titres de séjour « vie privée et familiale » en tant que membres de la famille (conjoints, enfants majeurs) d’un étranger ayant obtenu le statut de résident de longue durée-UE dans un autre État membre. L’autorisation de travailler s’applique à partir du premier jour de la deuxième année suivant la délivrance du titre pour les conjoints, et sans délai pour les enfants s’ils séjournent en France depuis au moins un an
- les titulaires de certaines cartes de séjour pluriannuelles « talent » et les membres de leur famille ou du visa de long séjour valant titre de séjour
- les titulaires de la carte pluriannuelle « salarié détaché ICT » (intra corporate transfer), « salarié détaché mobile ICT » ou du visa de long séjour valant titre de séjour et les membres de leur famille
- les titulaires de la carte de séjour temporaire « stagiaire ICT (famille) » ou du visa de long séjour valant titre de séjour
- les titulaires de la carte de séjour temporaire ou pluriannuelle « étudiant » ou « étudiant programme de mobilité » (ou du visa de long séjour valant titre de séjour), les titulaires de la notification de mobilité (lorsqu’ils ont été admis dans un autre État membre de l’Union européenne) pour une activité professionnelle salariée accessoire, dans la limite de 60 % de la durée annuelle de travail (964 heures)
- les titulaires d’une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle « étudiant » (ou du visa de long séjour valant titre de séjour) qui, dans le cadre de leur cursus, ont conclu un contrat d’apprentissage validé par le service compétent
- les titulaires de la carte « recherche d’emploi ou création d’entreprise » ou du visa de long séjour valant titre de séjour
- les bénéficiaires de la protection subsidiaire, du statut d’apatride et les membres de leur famille ;
- les titulaires d’une autorisation provisoire de séjour ou d’un document provisoire de séjour portant la mention « autorise son titulaire à travailler »
- les titulaires d’un visa « vacances travail »
- les étrangers exerçant certaines activités salariées pour une durée inférieure ou égale à 3 mois ;
- les praticiens étrangers répondant aux conditions prévues à l’article L. 5221-2-1, 2° du Code du travail.
11 – Lors de la vérification d’un titre de séjour, peut-on employer le salarié concerné avant la réponse de l’administration ou faut-il attendre 48h ? Et plus généralement, qu’a-t-on le droit de faire en attendant la réponse de la préfecture concernant la demande d’autorisation d’embauche d’un salarié étranger ?
L’employeur doit systématiquement vérifier le titre de séjour du candidat étranger deux jours ouvrables avant l’embauche, conformément aux articles (articles L. 5221-8 et R 5221-41 à R 5221-43 du code du travail).
La demande de vérification doit être envoyée par mail au préfet du département du lieu d’embauche, sauf si le candidat étranger est inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi tenue par France Travail.
En pratique, il est difficile d’agir rapidement car il est nécessaire d’attendre la réponse de la préfecture avant de permettre au salarié de commencer à travailler. Bien sûr, vous pouvez faire une promesse d’embauche qui prendra effet dès la date d’autorisation préfectorale. Aller au-delà est extrêmement risqué, car embaucher un salarié sans autorisation de travail peut entraîner des sanctions pénales et administratives très lourdes en cas de contrôle par l’administration.
12 – Comment vérifier l’employabilité des salariés étrangers ?
Comme indiqué plus haut, pour vérifier si l’on peut employer un salarié étranger, il faut :
- S’assurer qu’il a un titre de séjour valable
- S’assurer que ce titre lui permet de travailler
- Contacter la préfecture pour vérifier la régularité du titre qui a été présenté.
13 – Lors du recrutement d’un salarié étranger qui a un titre de séjour sur le point d’expirer, est-ce qu’il est nécessaire de faire une demande d’autorisation de travail afin qu’il puisse avoir son titre de séjour renouvelé ?
À notre avis, c’est une situation délicate car, en principe, le salarié doit avoir demandé le renouvellement de son titre de séjour. S’il ne l’a pas fait, il doit repartir.
Demander une autorisation de travail ne régularisera pas sa situation.
Il est nécessaire de procéder au renouvellement et de s’assurer que ce renouvellement mentionne que le salarié est autorisé à travailler pendant la période d’instruction.
14 – Comment détermine-t-on si le bulletin de paie doit être fait en France ou à l’étranger ?
En pratique, cette question soulève le problème du régime applicable aux régimes de sécurité sociale.
Premier principe : On applique le régime de sécurité sociale du lieu où s’exerce la prestation de travail.
Deuxième principe : Sauf convention bilatérale entre deux États.
Pour les salariés détachés au sein de l’Union européenne, le détachement, c’est-à-dire le maintien au régime de sécurité sociale du lieu d’origine, doit impérativement respecter les conditions suivantes :
- Le salarié doit avoir déjà travaillé pour la société qui le détache ou, s’il est embauché en vue de son détachement, avoir été soumis à la législation de l’État membre où est établi son employeur juste avant le début de son activité salariée, depuis au moins un mois.
- L’employeur doit maintenir un lien « organique » avec les salariés détachés.
- L’employeur doit s’abstenir de remplacer un salarié détaché par un autre salarié détaché.
- L’employeur doit exercer normalement ses activités sur le territoire de l’État d’emploi. Les activités exercées dans cet État doivent être substantielles, liées au métier de l’employeur et à la nature réelle de ses activités. Elles ne doivent pas se limiter à des activités de pure administration interne.
- Le salarié détaché doit appartenir à l’un des États visés par les dispositions (État membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen).
15 – Quelles sont les nouvelles mesures mises en place à compter de 2025 au regard de l’embauche des chercheurs étrangers (niveau Master/Doctorat) ?
A notre sens les modalités n’ont pas changé.
La situation est régie par une directive européenne relative aux conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers à des fins de recherches, d’études, de formation, de volontariat et de programmes d’échange d’élèves ou de projets éducatifs et de travail au pair a été adoptée le 11 mai 2016 (Directive CE 2016/801).
Cette directive a été complétée en France par une loi de programmation pluriannuelle de la recherche (LPR) votée le 24 décembre 2020.
Cette loi a créé un nouveau dispositif pour faciliter l’accueil des chercheurs et doctorants étrangers boursiers : le « séjour de recherche ».
Pour pouvoir en bénéficier, les doctorants et chercheurs étrangers doivent avoir une bourse accordée selon des critères scientifiques par un gouvernement étranger, une institution étrangère ou le ministère français des affaires étrangères.
La personne accueillie doit signer avec l’établissement d’accueil une convention de séjour de recherche qui encadre les modalités de prise en charge et mentionne notamment le montant total du financement (bourse + complément éventuel de l’établissement d’accueil) car ce montant total va déterminer le type de visa.
De mêmes, les chercheurs étrangers peuvent toujours venir en France, notamment dans le cadre d’un programme ERASMUS ou dans le cadre d’une coopération internationale ou d’un échange international.
L’idéal reste d’effectuer les démarches en lien avec son université d’origine car les services sont les plus à même de guider les chercheurs dans les arcanes de ces procédures souvent complexes.
16 – Quels sont les risques et sanctions en cas d’irrégularité dans l’embauche ?
Sanction pénale | Sanction administrative |
---|---|
Travail illégal Emploi d’un étranger non autorisé à travailler -> 3 à 5 ans d’emprisonnement -> 30 000 à 45 000 € d’amendes -> Peines complémentaires -> Peine contre la personne morale (fermeture, dissolution, interdiction…) | Emploi d’un étranger non autorisé à travailler -> Entre 21 000 € et 63 000 € d’amende administrative |
Les peines complémentaires sont certainement les plus efficaces puisqu’elles peuvent interdire l’exploitation.
18 – Comment gérer les demandes de salariés souhaitant télétravailler depuis l’étranger tout en bénéficiant de la protection sociale française ? Existe-t-il des alternatives à la déclaration obligatoire dans le pays de télétravail, comme la cotisation volontaire à la CFE ?
En principe, un travailleur est soumis à la législation sociale de l’Etat au sein duquel il travaille.
Ainsi, la personne qui exerce une activité salariée dans un État membre (État d’emploi) tout en résidant dans un autre État (État de résidence) est soumise à la législation de l’État où elle exerce son activité professionnelle (État d’emploi).
2 exceptions s’appliquent néanmoins :
- D’une part, pour tenir compte de la diversité des lieux de travail de certains salariés, l’article 13 du règlement 883/2004 prévoit en son paragraphe 1 a) que :
« La personne qui exerce normalement une activité salariée dans deux ou plusieurs États membres est soumise à la législation de l’État membre de résidence, si elle exerce une partie substantielle de son activité dans cet État membre ».
L’activité est considérée comme substantielle lorsqu’elle représente au moins 25 % de l’activité totale.
- D’autre part, depuis le 1er juillet 2023, par suite de la signature de l’accord-cadre multilatéral de sécurité sociale sur le télétravail par la France, les salariés exerçant moins de 50 % de leur activité en télétravail dans leur Etat de résidence peuvent rester soumis à la législation sociale de l’Etat d’emploi.
La France, la Suisse et l’Espagne sont signataires de cet accord.
Ce nouveau régime est dérogatoire; ainsi la demande doit être faite d’un commun accord par l’employeur et l’employé. L’accord du salarié est donc nécessaire, sinon ce sont les règles du règlement susvisé qui s’appliquent.
Concernant les systèmes type CFE pour « augmenter » la protection sociale du salarié, il n’y en a pas vraiment. C’est « à la carte ».
18 – Un contrat de travail pour un étranger avec un visa « talent artiste » peut-il inclure des tâches administratives dans ses fonctions ?
Un artiste-interprète ou l’auteur d’une œuvre littéraire ou artistique peut obtenir, sous certaines conditions, un titre de séjour l’autorisant à travailler.
L’obtention de ce titre de séjour étant conditionnée à l’exercice d’une activité d’artiste interprète ou à la qualité d’auteur d’une œuvre littéraire ou artistique, l’activité confiée à ce salarié doit être compatible avec la nature du titre octroyée.
Ainsi, seules des tâches administratives réalisées de manière extrêmement accessoires et n’étant pas de nature à remettre en cause la qualité d’artiste pourraient être réalisées par le titulaire d’un visa « talent artiste ».
La carte de séjour pluriannuelle passeport talent artiste-interprète permettra à son bénéficiaire de séjourner 4 ans continus à compter de son arrivée en France. Avant la fin de la validité de cette carte de séjour son titulaire a la possibilité de demander le renouvellement de son titre de séjour s’il exerce sa mission en France et ce, de manière continue.
Conditions pour les artistes salariés
- Le candidat au visa « passeport talent » pour artiste-interprète doit exercer son activité en France dans les domaines scientifique, littéraire, artistique, intellectuel, éducatif ou sportif.
- La durée de l’activité en tant qu’artiste-interprète en France doit être supérieure à trois mois.
- L’étranger doit fournir un ou plusieurs contrats de travail déclarés par ses employeurs, accompagnés des documents justifiant la situation de l’entreprise, notamment les licences d’entrepreneur de spectacle si nécessaire.
- L’étranger doit présenter des justificatifs relatifs à sa situation personnelle et professionnelle.
- Le candidat doit prouver qu’il dispose de ressources, principalement issues de son activité, pour la période de séjour envisagée, d’un montant au moins équivalent à 70 % du salaire minimum légal en France pour un emploi à temps plein.
19 – Comment gérer la suspension des contrats d’apprentissage en cas de défaut de titre de séjour ?
Pour suivre une formation en alternance, les étrangers, qu’ils soient mineurs ou majeurs, doivent disposer d’une autorisation de travail. Celle-ci peut être incluse dans leur titre de séjour (par exemple, un majeur avec un titre de séjour salarié, un titre de séjour travailleur temporaire ou un titre de résident de dix ans) ou non (comme un mineur sans titre de séjour ou un majeur avec un titre de séjour n’autorisant pas le travail à temps plein). Dans ce dernier cas, pour obtenir une autorisation de travail, les jeunes concernés doivent soumettre un dossier complet à la Dreets (anciennement Direccte) de leur département de résidence, incluant notamment leur contrat de travail et le formulaire CERFA de demande d’autorisation de travail.
Il est important de rappeler qu’une entreprise ne peut pas rompre de manière anticipée le contrat d’apprentissage d’un apprenti en raison du non-renouvellement de son titre de séjour ou de son autorisation provisoire de travail (APT). Ce motif ne fait pas partie des raisons permettant à un employeur de rompre le contrat après les 45 premiers jours (article L.6222-18 du Code du travail).
Ainsi, le contrat de travail de l’apprenti est suspendu le temps que son titre de séjour soit renouvelé. L’apprenti peut même continuer à travailler si le récépissé de sa demande de renouvellement de titre de séjour mentionne « autorise son titulaire à travailler ».
20 – Quelles sont les spécificités de divers pays concernant l’obligation de vigilance prévue par le Code du Travail ?
La Liste Nominative des Travailleurs Étrangers (LNTE) fait partie du trio de documents clés de l’obligation de vigilance du donneur d’ordre à l’égard de ses sous-traitants. Obligatoire lorsque la valeur du contrat dépasse 5 000 euros HT sur l’année, cette liste encadrée par le Code du travail permet aux donneurs d’ordre d’exercer leur obligation légale de vigilance vis-à-vis de l’emploi par leurs sous-traitants de travailleurs hors Espace Économique Européen.
Son but est d’assurer que le sous-traitant respecte ses obligations légales en matière d’emploi de travailleurs étrangers, et ainsi de lutter contre le travail dissimulé. En cas de non-conformité du sous-traitant à ces obligations, le donneur d’ordre pourrait être sanctionné solidairement.
À propos de L'auteur
Stanislas Dublineau
Avocat associé chez In Extenso Avocats
Stanislas est titulaire d’un doctorat de droit privé. Avocat depuis 2004, il exerce son activité exclusivement en droit social et conseille des entreprises de toute taille ainsi que des syndicats patronaux et des organismes professionnels chez In Extenso Avocats.
Laurent Bizet
Expert-comptable
Laurent Bizet est associé et expert-comptable. Il intervient auprès des dirigeants à Paris et en Ile-de-France.
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