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Charges sociales : le point sur les 4 mesures exceptionnelles d’aide aux employeurs
Date de publication : 30.11.20
Afin de contribuer à limiter l’impact de la crise sanitaire sur l’économie française, le plan de soutien des entreprises a prévu :
• Une exonération partielle de cotisations et contributions patronales ;
• Une aide au paiement de celles restant dues ;
• La mise en place de plans d’apurement sans pénalités ni majorations de retard ;
• Une remise partielle de dette de cotisations et contributions sociales.
(3ème et 4ème lois de finances rectificatives pour 2020, PLFSS pour 2021)
Ces mesures sont reconduites par le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale pour 2021 (PLFSS 2021) et restent donc incontournables pour les TPE-PME affectées par les conséquences économiques de la crise sanitaire de mars à ce jour.
Toutefois, pour rappel, même les entreprises qui ne présentent pas de difficultés de paiement sont éligibles puisque l’objectif principal de ces mesures est de réduire les passifs sociaux accumulés par les employeurs qui ont reporté le paiement de leurs cotisations et contributions et, plus globalement, de favoriser la relance.
Il s’agit d’un ensemble de mesures inédites de part leur ampleur et périmètre d’application.
Les mesures gouvernementales de restriction liées à la « deuxième vague de la Covid-19 » ont justifié de prolonger ces dispositifs d’aide.
• Le bénéfice des mesures de l’article 65 de la 3ème LFR par les entreprises relevant des secteurs d’activité éligibles en application du décret n° 2020-1328 du 2 novembre 2020 relatif au fonds de solidarité : ces mesures peuvent être déclarés au plus tard à l’échéance DSN de janvier ;
• Les entreprises qui seraient éligibles aux nouveaux dispositifs d’exonération et d’aide au paiement en application du PLFSS pour 2021 qui modifie l’article 65 précité. De même, le dispositif de plan d’apurement est prorogé.
Les mesures d’exonération et d’aide au paiement des charges sociales
Sont éligibles les TPE-PME fortement impactées par la crise
Ces deux mesures sont applicables aux entreprises de moins de 250 salariés et qui relèvent d’un des secteurs d’activité suivants :
- secteurs « prioritaires », particulièrement affectés par les conséquences économiques de la crise sanitaire : tourisme, hôtellerie, restauration, culture, transport aérien, événementiel etc.
- ou secteurs « connexes » aux secteurs prioritaires et qui ont subi une forte baisse de leur chiffre d’affaires.
Pour ces entreprises, la période d’emploi concernée par ces mesures s’étend du 1er février au 31 mai 2020, ou jusqu’au dernier jour du mois précédant celui de l’autorisation d’accueil du public dans les cas d’une interdiction d’accueil prolongée.
Les employeurs éligibles du fait de l’intégration de nouveaux secteurs par le décret n°2020-1328 du 2 novembre 2020 peuvent déclarer ces mesures au plus tard dans les DSN exigibles au 5 ou 15 janvier 2021 (délai résultant de deux fiches DSN concernant l’exonération et concernant l’aide au paiement), sans application de pénalités. Bien que ces dates butoirs n’aient pas été entérinées par décret, les entreprises peuvent sereinement s’y référer, mais plus tard elles déclareront ces mesures, plus tard leur trésorerie en bénéficiera.
Pour les autres secteurs d’activité, les employeurs avaient jusqu’au 30 novembre 2020 pour régulariser leur DSN et bénéficier de ces mesures (délai résultant d’un communiqué de presse de Bruno Le Maire du 14 octobre 2020).
Pour prétendre au bénéfice de ces mesures, les TPE/PME relevant des secteurs connexes doivent justifier :
• Soit une baisse de chiffre d’affaires d’au moins 80 % durant la période comprise entre le 15 mars et le 15 mai 2020 :
• par rapport à la même période de l’année précédente
• ou par rapport au chiffre d’affaires mensuel moyen de l’année 2019 ramené sur deux mois
• ou, pour les entreprises créées après le 15 mars 2019 et avant le 10 mars 2020, par rapport au montant moyen calculé sur deux mois du chiffre d’affaires réalisé entre la date de création de l’entreprise et le 15 mars 2020 ;
• Soit une baisse de chiffre d’affaires durant la période comprise entre le 15 mars et le 15 mai 2020 par rapport à la même période de l’année précédente représente au moins 30 % du chiffre d’affaires de l’année 2019 ou, pour les entreprises créées entre le 1er janvier et le 14 mars 2019, du chiffre d’affaires réalisé entre la date de création de l’entreprise et le 31 décembre 2019 ramené sur 12 mois.
Nota bene : les TPE contraintes de fermer leur activité au public en application du décret n° 2020-293 du 23 mars 2020, étaient également éligibles, pour la période d’emploi s’étendant du 1er février au 30 avril 2020, si leur effectif était de moins de 10 salariés.
Quels sont les montants de l’exonération et de l’aide au paiement
Modalités de l’exonération partielle de cotisations patronales
Cette exonération de cotisations patronales a le même champ d’application que la réduction générale de cotisations patronales (RGCP), à l’exception des cotisations de retraite complémentaire qui sont exclues. Elle concerne ainsi les cotisations et contributions patronales des assurances maladie et vieillesse, d’allocations familiales, du FNAL, de la contribution de solidarité pour l’autonomie, des cotisations d’assurance chômage.
Elle s’applique, sans limite de rémunération, sauf pour les cotisations d’accidents du travail/maladies professionnelles, sur les cotisations et contributions patronales restant dues après application de la réduction générale de cotisations ou de toute autre exonération.
En pratique, elle s’applique aux cotisations dues sur les rémunérations supérieures au SMIC, puisque les cotisations sociales dues sur les rémunérations jusqu’au SMIC sont déjà intégralement exonérées au titre de la réduction générale de cotisations patronales.
Modalités de l’aide au paiement des charges sociales
Si votre entreprise est éligible à l’exonération exceptionnelle susvisée, alors elle bénéficie également d’une aide au paiement des charges sociales puisque les revenus d’activité éligibles à l’exonération partielle de cotisations patronales ouvrent droit à une aide égale à 20 % du montant de ces revenus. Ces deux mesures sont cumulables !
Ce montant de 20% se calcule sur l’assiette de cotisations et contributions sociales, le cas échéant abattue en application d’autres dispositifs (ex : déduction forfaitaire spécifique pour frais professionnels, assiette forfaitaire de cotisations etc.).
Ce crédit de cotisations est imputable sur l’ensemble des sommes dues à l’Urssaf (ou MSA) au titre de l’année 2020, après application de l’exonération partielle de cotisations patronales et de toute autre exonération.
A savoir : cette aide s’applique également aux cotisations et contributions salariales, alors que la mesure d’exonération ne concerne que les charges patronales.
Le législateur a ainsi souhaité :
- aider les employeurs à régler les cotisations et contributions salariales reversées dont ils avaient reporté le paiement ;
- réduire les charges sociales au moment de la reprise d’activité pour ceux qui les ont réglées et bénéficieront ainsi d’un crédit de cotisations.
L’activité s’entend de l’activité principale et réelle de l’entreprise, peu important l’activité déclarée ou la convention collective de branche appliquée. In Extenso a élaboré une correspondance indicative des activités éligibles avec les codes NAF existants.
En cas de doute sur l’interprétation des secteurs éligibles, l’Urssaf semble en pratique apporter des réponses écrites argumentées aux cotisants qui la sollicitent.
Pour rappel, la déclaration à tort de l’exonération et de l’aide au paiement font encourir à l’entreprise, en cas de contrôle, un risque de redressement par l’organisme de recouvrement et potentiellement l’application de pénalités en raison des déclarations DSN inexactes.
L’article 6 ter du PLFSS pour 2021 met en place un dispositif similaire d’exonération des cotisations sociales et d’aide au paiement suite aux nouvelles mesures prises pour faire face à la recrudescence de l’épidémie.
Seraient concernées :
• Les entreprises de moins de 250 salariés relevant d’un des secteurs prioritaires ou connexes (liste à préciser) et ayant subi une mesure d’interdiction d’accueil du public ou une baisse de CA d’au moins 50 %. C’est un dispositif légèrement plus restrictif qui s’annonce donc puisque qu’il impose aux entreprises relevant d’un secteur d’activité « prioritaire » de justifier d’une mesure d’interdiction d’accueil du public ou d’un seuil de baisse de CA.
• Les entreprises de moins de 50 salariés relevant d’autres secteurs que ceux définis ci-dessus et concernées par une mesure d’interdiction d’accueil du public affectant de manière prépondérante la poursuite de leur activité. Notons que le seuil est ainsi relevé de 10 à 50 salariés pour ces « autres secteurs ».
L’exonération s’appliquerait aux périodes d’emploi courant à compter du 1er septembre 2020 ou du 1er octobre 2020 selon les cas. Cette exonération serait applicable pour une période maximale de trois mois et au plus tard pour les périodes d’emploi courant jusqu’au 30 novembre 2020.
Les employeurs éligibles à cette exonération bénéficieraient également d’une aide au paiement imputable sur les sommes dues aux organismes de recouvrement au titre des années 2020 et 2021, à l’exclusion des périodes d’emploi qui ont été déjà couvertes par l’aide au paiement prévue au II de l’article 65 de la loi n° 2020‑935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020.
Les entreprises qui sont hors champ de ces dispositifs ou qui présentent des dettes sociales malgré l’application de ces mesures peuvent conclure un plan d’apurement. Dans ce cadre et sous certaines conditions, l’Urssaf (ou la caisse MSA) peut consentir une remise.
Dispositif de plan d’apurement et/ou d’une remise de cotisations et contributions sociales
La 3ème loi de finances rectificative a également ouvert la possibilité de conclure un plan d’apurement avec l’Urssaf (ou la MSA) sans pénalités ni majorations de retard, pour les cotisations et contributions sociales restant dues au 30 juin 2020, incluant le cas échéant les dettes antérieures à la crise sanitaire.
Les entreprises qui bénéficient des mesures d’exonération sociale et de « crédit », exposées supra, peuvent en outre appliquer un plan d’apurement en accord avec l’Urssaf (ou la caisse MSA) et sans pénalités ni majorations de retard.
Le plan d’apurement ne peut inclure une remise partielle de cotisations et contributions sociales dues à l’Urssaf (ou à la MSA) pour la période d’emploi du 1er février au 31 mai 2020 que si :
- l’effectif de l’entreprise est inférieur à 250 salariés ;
- et elle ne bénéficie pas par ailleurs des mesures d’exonération exceptionnelle et de « crédit » de charges sociales ;
- et elle a subi une perte de chiffre d’au moins 50 % par rapport à la même période de l’année précédente.
Pour les entreprises de moins de 250 salariés, le directeur de l’Urssaf (ou de la caisse MSA) peut proposer sans démarche de l’employeur un plan d’apurement, lequel est réputé accepté en l’absence d’opposition ou de demande d’aménagement par l’employeur dans un délai d’un mois.
Attention, les entreprises qui ne sont pas à jour de leurs cotisations et contributions sociales, et qui ne justifient pas d’un échéancier ou d’un plan d’apurement conclu, ne peuvent normalement bénéficier des aides d’Etat et notamment des nouvelles aides à l’embauche.
Le PLFSS pour 2021 proroge le dispositif d’apurement pour les dettes constatées jusqu’au 31 décembre 2020, sachant que cette date pourrait être étendue par décret jusqu’au dernier jour de la période d’emploi suivant la fin de l’état d’urgence sanitaire – soit, pour le moment jusqu’au 28 février 2021.
Dans ce cadre, le plan d’apurement pourrait être souscrit jusqu’au 31 mars 2021.
Des précisions restent toutefois attendues sur l’applicabilité de la demande de remise partielle de cotisations sociales puisque, même si l’on peut présager d’une date limite de demande fixée également au 31 mars 2021, la période d’emploi initiale (du 1er février au 31 mai 2020) n’est pas revue par le texte.
Pour sécuriser la mise en œuvre pratique de ces différentes mesures, chaque entreprise/association doit s’assurer d’une part de son éligibilité à l’une ou plusieurs de ces mesures avant d’en déterminer le montant et de le déclarer dans les délais fixés par les textes.
A titre d’illustration et sans prétendre à l’exhaustivité, quelques questions à se poser pour fiabiliser ses démarches :
• Mon effectif me permet-il de prétendre aux deux premières mesures ? A quel niveau s’apprécie cet effectif et comment s’apprécie-t-il ?
• Mon activité principale relève-t-elle de l’une des activités listées par le décret du 30 mars 2020 relatif au Fonds de solidarité ? du décret du 2 novembre 2020 ?
• Mon code NAF me permet-il à lui seul de justifier l’applicabilité de ces mesures ?
• Quid si l’activité principale de l’un de mes établissements diffère de celle de l’entreprise ?
• Est-ce que je respecte les conditions applicables aux TPE/PME de moins de 10 salariés ?
• Les holdings peuvent-elles bénéficier de ces meures ?
• La rémunération du mandataire social exclusif peut-elle ouvrir droit au bénéfice d’une aide au paiement des cotisations ?
• Comment apprécier la perte de chiffre d’affaires prévue dans les différentes mesures ?
• Comment déterminer le montant de l’exonération partielle de cotisations patronales à laquelle prétendre ainsi que le montant de l’aide au paiement des cotisations ? Quels sont les pièges à éviter ?
• Comment déclarer ces montants et les imputer sur les cotisations ?
• Votre logiciel de paie est-il à jour ?
• Les cotisations restant dues avant l’application de ces mesures doivent-elles être réglées ?
• Etc.
Sources :
Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 (Article 65)
Instruction n° DSS/5B/SAFSL/2020/160 du 22 septembre 2020
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 (article 6 ter).
A propos de L'auteur
Méryl Ulmann
Juriste en Droit social
En tant que Responsable Conseil Social au sein d’In Extenso, Méryl Ulmann intervient en support des juristes et gestionnaires paie sur les problématiques de droit du travail et de protection sociale complémentaire.
Elodie Tabel-Diffaza
Directrice Marché Conseil Social et Paie
Spécialisée en droit social et droit de la protection sociale complémentaire, Elodie a rejoint le groupe In Extenso en 2008 en tant que Directrice Marché Conseil Social et Paie
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Méryl Ulmann
Juriste en Droit social
En tant que Responsable Conseil Social au sein d’In Extenso, Méryl Ulmann intervient en support des juristes et gestionnaires paie sur les problématiques de droit du travail et de protection sociale complémentaire.
Elodie Tabel-Diffaza
Directrice Marché Conseil Social et Paie
Spécialisée en droit social et droit de la protection sociale complémentaire, Elodie a rejoint le groupe In Extenso en 2008 en tant que Directrice Marché Conseil Social et Paie
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