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Directive OMNIBUS : Durcissement des règles entre professionnels et consommateurs
Date de publication : 30.03.22
La multiplication des plateformes numériques ou places de marché a entrainé une modification des habitudes d’achat des consommateurs, amplifiée par le contexte sanitaire lié au Covid 19. Afin d’encadrer plus efficacement les pratiques commerciales, la législation applicable aux professionnels a été renforcée avec la transposition en droit français (loi d’habilitation DADDUE du 3 décembre 2020 et ordonnance 2021-1734 transposant la Directive Omnibus relative à une meilleure application et une modernisation des règles de l’Union en matière de protection des consommateurs) de la directive Omnibus (directive 2019/2161 du 27 octobre 2019).
A compter du 28 mai 2022, date d’effet des nouvelles règles mises en place, les professionnels, tous secteurs d’activité confondus et quelle que soit leur taille, verront leurs obligations étendues et les sanctions applicables accentuées afin de favoriser la protection des consommateurs dans le cadre d’une mutation technologique du droit de la concurrence et de la consommation et du droit de la vente.
Afin de vous accompagner dans l‘adaptation de votre entreprise à ces nouvelles pratiques, voici un panorama de ces nouveaux dispositifs.
De nouvelles définitions entrent dans le Code de la consommation
Le Code de la consommation est enrichi de trois nouvelles définitions :
- Place de marché en ligne : s’entend d’un service utilisant un logiciel, y compris un site internet, une partie de site internet ou une application, exploité par un professionnel ou pour son compte et qui permet aux consommateurs de conclure des contrats à distance avec d’autres professionnels ou consommateurs.
Cela vise aussi bien votre site internet personnel que les plateformes sur lesquelles vous mettez à disposition vos biens ou services, que vous soyez professionnel ou non.
Par exemple, vous êtes loueur en meublé (professionnel ou non) et vous avez un site internet ou mettez en location via Airbnb, Abritel, Homelidays ou une autre plateforme, vous êtes dorénavant visé par ces règlementations.
Vous êtes un professionnel et vous vendez via des sites marchands (Amazon, Ebay, Leboncoin, tous formats de « marketplace »), vous êtes également visés.
- Opérateur de place de marché en ligne : tout professionnel qui fournit une place de marché en ligne aux consommateurs.
A ce titre, votre entreprise peut être considérée comme opérateur de place de marché en ligne, si elle développe un site internet permettant à des consommateurs d’acheter, d’échanger ou de partager des biens ou des services auprès de tiers.
- Pratique commerciale : toute action, omission, conduite, démarche ou communication commerciale, en ce compris le marketing et la publicité, d’un professionnel en relation directe avec la promotion, la vente ou la fourniture d’un bien ou service.
En clair, si vous avez une activité économique en ligne, vous êtes concerné par cette réglementation et il faut agir vite.
Un encadrement renforcé des annonces de réduction de prix
Toutes réductions de prix (soldes, opération de « Black Friday », ventes privées et autres périodes de remises commerciales) devront dorénavant faire mention « du prix pratiqué avant l’application de la réduction de prix » qui est défini comme :
- Le prix le plus bas pratiqué par le professionnel sur une période de 30 jours avant la mise en place de l’offre promotionnelle,
- Le prix le plus bas avant la première réduction dans le cas où il y aurait des réductions successives.
Ne seront pas concernées :
- Les réductions de prix sur des produits périssables ayant une altération rapide,
- Les comparaisons de prix entre un professionnel et ses concurrents.
Cet affichage devra être non équivoque pour le consommateur.
A défaut, le professionnel pourra se voir sanctionné par :
- Une peine pouvant aller jusqu’à 2 ans de prison,
- Une amende pouvant aller jusqu’à 300 000 euros mais qui pourra en fonction des avantages retirés par le professionnel être portée :
- A 10% de son chiffre d’affaires annuel moyen,
- A 50% de ses dépenses engagées pour la réalisation de la campagne de publicité ou de la pratique mise en cause.
Une clarification du parcours d’achat en ligne du consommateur – Détermination des pratiques commerciales déloyales
A compter du 28 mai 2022, seront considérées comme des pratiques commerciales déloyales :
Face à cette nouvelle typologie, dans le cadre de son parcours d’achat l’acheteur devra être informé :
- De la qualité de professionnel ou de non professionnel du vendeur dont il prévoit d’acheter les produits (cela vise notamment les sites qui proposent à des non professionnels de vendre des produits ou services sans pour autant avoir le statut de professionnel, rendant le contenu de ces sites peu lisible pour les consommateurs),
- De l’application d’un prix personnalisé, déterminé en fonction de ses recherches et habitudes de consommation,
- Des caractéristiques essentielles du bien, du service, du service numérique ou du contenu numérique,
Pour ce qui est du référencement d’un produit, sont dorénavant comprises comme des pratiques commerciales trompeuses :
- La présentation d’un bien comme étant identique à un bien commercialisé alors qu’il a une composition ou des caractéristiques différentes (attention cette nouvelle règlementation n’empêche pas d’ailleurs de poursuivre le fabricant au titre de l’utilisation de qualités fallacieuses : usage d’une marque ou dénomination abusive, d’une qualité abusive, AOP, caractère biologique, qualités intrinsèques d’un produit ou vertus non avérées…),
- La fourniture des résultats de recherche en réponse à une requête d’un consommateur sans l’informer clairement de tout paiement effectué spécifiquement par un tiers pour obtenir un meilleur classement,
- La revente à des consommateurs de billets pour des manifestations en contournant les restrictions de revente,
- La diffusion ou le fait de diffuser ou faciliter la diffusion de faux avis ou de fausses recommandations de consommateurs.
Enfin, le vendeur devra mettre à disposition un formulaire afin de valider le souhait du consommateur de renoncer explicitement à son droit de rétractation.
Le professionnel ne respectant pas ces mentions pourra être sanctionné par une amende pouvant aller jusqu’à 300 000 €.
Par ailleurs, dans le cas où le non-respect de ces mentions est constaté non seulement en France mais dans d’autres pays membres de l’Union Européenne, l’amende pourrait être portée à 4% de son chiffre d’affaires moyen sur les trois derniers exercices ou 2 millions d’euros à défaut d’information suffisante disponible sur le chiffre d’affaires.
Un renforcement des sanctions en cas de maintien d’une clause jugée abusive
Chaque année, la Commission des Clauses Abusives publie une liste à jour des clauses qu’elle considère comme abusives. Ses avis sont directement accessibles sur le lien suivant : Accueil – Commission des clauses abusives (clauses-abusives.fr).
La transposition de la Directive Omnibus est ici venue renforcer l’effectivité des sanctions sur les clauses abusives. En effet, la mention, dans votre documentation commerciale, d’une clause jugée abusive par une décision de justice définitive entrainera dorénavant pour le professionnel une condamnation à payer des dommages et intérêts et il devra s’acquitter d’une amende :
- D’un montant de 15.000 euros pour une personne physique (entreprise individuelle, EIRL, non professionnel),
- D’un montant de 75.000 euros pour une personne morale.
Également, dans le cas où le non-respect de ces mentions est constaté non seulement en France mais dans d’autres pays membres de l’Union Européenne, l’amende pourrait être portée à 4% de son chiffre d’affaires moyen sur les trois derniers exercices ou 2 millions d’euros à défaut d’information suffisante disponible sur le chiffre d’affaires.
Il est donc important, avec l’assistance de votre conseil, d’auditer vos contrats commerciaux afin d’identifier les clauses considérées comme abusives.
A lire : Les risques des TPE-PME à l’aune de la guerre
Une mise en évidence de son suivi client par le professionnel et le renforcement de l’obligation d’information précontractuelle
Le professionnel devra explicitement informer le consommateur des modalités de mise en œuvre des garanties légales, de la mise en place de garanties commerciales et de l’identification d’un service après-vente.
En cas de non-respect, ce dernier se verra sanctionné par une amende pouvant aller :
- De 3 000 euros à 15 000 euros pour le professionnel personne physique,
- De 15 000 euros à 75 000 euros pour le professionnel personne morale.
La fin du démarchage à domicile non sollicité
Autre apport de la transposition de la Directive Omnibus, dorénavant la personne dont l’activité consiste en des visites à domicile pour du démarchage devra solliciter préalablement l’accord du consommateur « de manière claire et non ambiguë ». Toute visite non sollicitée sera donc interdite et le prestataire de services ou le vendeur de biens pourra se voir condamner à une amende pouvant aller jusqu’à 150 000 euros pour les personnes physiques (entreprise individuelle, EIRL, non professionnel) ainsi qu’à une peine d’emprisonnement d’un an et pour les personnes morales, jusqu’à 750 000 euros.
Afin de garantir l’effectivité de l’ensemble de ces nouvelles règles à l’échelle nationale et européenne, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et la répression des fraudes (la DGCCRF) voit ses missions et pouvoirs étendus dans le cadre de son contrôle.
Il convient par ailleurs d’avoir une attention particulière au respect de ces règles en cohérence avec la réglementation RGPD (protection des données personnelles des clients notamment) dans le cadre du parcours commercial du client avec le professionnel.
Cet éventail de nouvelles règles impose de se mettre en conformité, avant le 28 mai 2022, notamment pour l’ensemble des supports contractuels, avec une vigilance particulière sur les conditions générales et particulières de vente.
L’avis de l’expert
Cette nouvelle réglementation vient compléter une réglementation déjà complexe et fournie en matière de relation commerciale entre professionnels et consommateurs dans une protection systématique du consommateur ou tout le moins en lui assurant une meilleure information.
Cela vise notamment les sites internet mais également tous les documents commerciaux intervenant au cours de la relation client (conditions générales de vente, conditions particulières, bons de commandes, …).
Il est donc important de vous assurer que votre documentation commerciale est bien en conformité avec cette réglementation et les réglementations antérieures non modifiées par ces règles.
A propos de L'auteur
Pierre Lamant
Directeur Juridique chez In Extenso
Directeur juridique au sein d’In Extenso Sud-Ouest depuis 7 ans et fort d’une expérience en droit des affaires depuis 20 ans, Pierre intervient en tant que conseil juridique en droit des affaires incluant l’organisation juridique, le droit des sociétés, les contrats commerciaux et l’ensemble des problématiques liées aux acquisitions et fusions.
Leala Ben Mohamed
Juriste
Juriste au sein du cabinet In Extenso Bordeaux, Leala dispose d’une solide expérience comme Juriste. Elle intervient dans le domaine du droit des affaires auprès des clients.
Manon Nedelec
Juriste
Juriste au sein du cabinet In Extenso Bordeaux, Manon participe à l’accompagnement des sociétés dans leur suivi juridique en droit des sociétés et droit des contrats.
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