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Pas de bail commercial valable sans diagnostics immobiliers !

Date de publication : 04.09.24

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Le bail commercial, en tant que contrat de location conclu entre le propriétaire d’un local et un locataire qui l’exploite à des fins commerciales, artisanales ou industrielles, est soumis à un régime juridique strict essentiellement régi par les articles L145-1 et suivants du code de commerce. Ces articles viennent définir ce qu’il convient d’appeler le « statut des baux commerciaux ».

Toutefois, le bail commercial reste un contrat, un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes, destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations. Il est donc soumis aux mêmes règles que les autres contrats et notamment à un devoir d’information préalable à la contractualisation de cette relation. Cette obligation a pour but de permettre au preneur d’avoir une information précise sur les locaux qui lui seraient mis à disposition. Elle est finalement le pendant de l’information légitime que sollicite le bailleur sur le candidat à la location. Elle permet aux deux parties d’avoir une information contradictoire leur permettant de mieux définir le cadre de leur future relation juridique dans le cadre du bail.

Ces diagnostics immobiliers vont permettre de donner au locataire une information extérieure au bailleur, attestée par un professionnel sur l’état locatif du bien qu’il va louer.

Une obligation d’information imposée par la loi de manière générale

L’obligation d’information qui pèse sur le bailleur, préalablement à la mise en location conditionne la validité du bail commercial. Cette obligation est issue en premier lieu de la notion de devoir précontractuel d’information à la charge du bailleur. En effet l’article 1112-1 alinéa 1er du Code Civil dispose que « Celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant. ».

Cette obligation d’information est ainsi applicable à tous les baux commerciaux, que ce statut s’applique de droit ou sur option des parties (cas où le bailleur et le preneur décident volontairement d’appliquer les règles des baux commerciaux plutôt qu’une autre réglementation).

Cet article du Code Civil impose donc au bailleur de délivrer au preneur toutes les informations déterminantes de son consentement. Cette notion a une grande importance en matière de baux puisque si le défaut d’information précontractuelle constitue un vice du consentement, le contrat de bail peut être annulé.

Il est tout à la fois dans l’intérêt du bailleur et du preneur qu’une information claire soit donnée avant même la contractualisation du bail pour éviter tout débat ultérieur.

Une information préalable

L’article 3.3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, partiellement modifié par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 prévoit que le dossier de diagnostic technique (DDT) doit être fourni par le bailleur au locataire en annexe au contrat de location lors de sa signature ou de son renouvellement.

Ces dispositions sont d’ordre général et visent tous les contrats de location quelle que soit la nature du local loué.

En outre, les dispositions propres au statut des baux commerciaux prévoient que les informations locatives, en ce comprises les diagnostics doivent être transmis aux candidats à la location dès la mise en location. Cela suppose ainsi de disposer de ces informations avant même de mettre en location. Il est donc important de constituer le dossier locatif en intégrant ces informations préalables.

Il est par ailleurs largement recommandé si une première visite préalable au bail est réalisée de faire signer au candidat locataire une quittance de cette information dès cette visite afin de conserver une trace de cette information préalable et de s’assurer qu’il a pu en prendre connaissance pour forger son appréciation des locaux en connaissance de cause avant de les prendre en location. Cela évite très souvent a posteriori des situations conflictuelles liées à une incompréhension du preneur et du bailleur au stade de la préparation du bail. Il faut bien mesurer que la relation contractuelle va durer en général 9 ans (a minima, sauf cas de résiliation triennale anticipée) et qu’il est fondamental de s’être bien compris en amont.

Si cela n’a pas été fait, rien n’est perdu pour autant, mais il faudra s’assurer que ces éléments soient annexés au bail et idéalement qu’une trace d’une information préalable à la signature soit conservée. Par exemple, il est possible de les annexer au projet de bail ou à la promesse de bail s’il en est établi un en amont de la signature.

Il convient par ailleurs de rappeler que cette obligation d’information intervient lors de la signature d’un bail initial mais a vocation également à intervenir en cas de renouvellement du bail. A cette occasion, il conviendra que le bailleur fournisse au preneur une version actualisée des informations transmises dès lors que le renouvellement du bail s’entend en pratique de la signature d’un nouveau bail et non de la poursuite de la relation contractuelle antérieure.

A ce titre, il nous semble risqué de ne pas procéder à cette actualisation en se protégeant derrière la prolongation tacite du bail antérieur sans avoir respecté les règles relatives au renouvellement (outre les risques liés à une telle situation sur la pérennité du bail par ailleurs).

Quelles informations doit fournir le bailleur à son futur locataire ?

Ainsi la loi est venue préciser les informations qui doivent systématiquement et impérativement être transmises au locataire et impose notamment au bailleur de fournir au preneur les diagnostics techniques.

Dans le cadre du bail commercial, deux diagnostics immobiliers doivent être fournis lors de la conclusion du contrat, savoir :

  • Le diagnostic de performance énergétique (DPE)
  • L’état des risques et pollutions (ERP).

Le diagnostic de performance énergétique (dit « DPE »)

Le diagnostic de performance énergétique permet de fournir au locataire des renseignements sur la performance énergétique et climatique d’un logement ou d’un bâtiment (étiquettes A à G), en évaluant sa consommation d’énergie et son impact en termes d’émissions de gaz à effet de serre.
Ce diagnostic doit être établi dès la mise en location puisque le législateur impose qu’il soit fait mention, dans les annonces relatives à la location d’un bien immobilier, les informations relatives au classement du bien au regard de sa performance énergétique et de sa performance en matière d’émissions de gaz à effet de serre. Ce diagnostic doit être mis à la disposition du candidat locataire.
De plus, l’article L126-29 du code de la construction et de l’habitation impose également au bailleur d’annexer le diagnostic de performance énergétique au contrat de bail commercial.

Une durée de validité de 10 ans actuellement pour le DPE

L’article D126-19 du code de la construction et de l’habitation, dispose que :
« La durée de validité du diagnostic de performance énergétique prévu à l’article L. 126-26 est fixée à dix ans.
Lorsque les diagnostics de performance énergétique ont été réalisés entre le 1er janvier 2013 et le 1er juillet 2021, leur durée de validité est fixée dans les limites suivantes :
a) Les diagnostics réalisés entre le 1er janvier 2013 et le 31 décembre 2017 sont valides jusqu’au 31 décembre 2022 ;
b) Les diagnostics réalisés entre le 1er janvier 2018 et le 30 juin 2021 sont valides jusqu’au 31 décembre 2024. »

Il faut donc retenir que pour les diagnostics réalisés, à compter du 1er juillet 2021, la durée de validité est fixée à dix ans.

L’état des risques et pollutions (dit « ERP »)

L’article L125-5 du code de l’environnement impose au bailleur d’annexer l’état des risques et pollutions aux baux commerciaux. Cette obligation concerne les biens immobiliers situés dans les zones couvertes par un plan de préventions des risques technologiques ou par un plan de prévention des risques naturels prévisibles, prescrit ou approuvé, dans des zones de sismicité ou dans des zones à potentiel radon.

L’état des risques et pollution doit être fournis au futur locataire, lors de la première visite de l’immeuble et doit être annexé au bail commercial lors de sa conclusion. Il est important de préciser que l’état des risques transmis lors de la première visite doit être établi depuis moins de six mois. Par conséquent, il conviendra d’actualiser les informations contenues dans l’état des risques et pollutions, si ces informations ne sont plus exactes à la date de signature du bail commercial (ou de son renouvellement).

Dans le cadre de ce devoir d’information, le code de l’environnement impose également au bailleur d’informer le locataire, lorsque les informations rendues publiques font état d’un risque de pollution des sols affectant le terrain loué. Le bailleur doit donc informer le locataire concernant la pollution des sols. Il doit également informer son locataire, dans l’état des risques, lorsque l’immeuble bâti a subi un sinistre ayant donné lieu au versement d’une indemnité au titre de la garantie nationale contre les effets des catastrophes technologiques ou naturelles constatées par arrêté interministériel, soit au profit du bailleur, soit au profit d’un précédent propriétaire.

En cas de non-communication de l’état des risques et pollution, au locataire, ce dernier, peut soit demander la résolution du bail, soit demander la diminution du loyer. Il est précisé que les tribunaux considèrent que la communication a posteriori des documents ne permet pas de régulariser le manquement. Il est également important de préciser que les sanctions encourues sont soumises à l’appréciation des juges. Par conséquent la résolution du bail ou la diminution du loyer, ne seront pas systématiquement appliquées par les tribunaux.

Amiante / Plomb, Termites… Ces autres diagnostics sont-ils obligatoires?

En ce qui concerne les autres diagnostics techniques, ils ne sont obligatoires qu’en matière de bail à usage d’habitation. Cela visa ainsi le diagnostic amiante, plomb, termites, gaz et électricité, radon et mérule.

A proprement parler, ils ne sont pas obligatoires en matière de baux commerciaux. Du moins, leur absence à ce jour n’est pas de nature à remettre en cause la validité du bail en lui-même.

Pour autant il convient de noter qu’au regard de la réforme du droit des obligations, issue de la loi du 10 février 2016, et du nouvel article 1112-1 du Code Civil, il est très largement conseillé pour le bailleur de fournir ces informations au titre de l’obligation générale précontractuelle d’information afin de permettre au preneur d’avoir une parfaite connaissance des locaux loués.

Il est ainsi préconisé de mettre à la disposition du locataire les différents diagnostics et notamment en matière d’amiante. En effet, concernant le diagnostic amiante, le législateur a mis en place une obligation de rechercher la présence de ce matériau cancérigène dans les immeubles. Cette obligation impose notamment la constitution d’un dossier technique d’amiante qui doit être tenu à la disposition de tout occupant de l’immeuble. Le dossier ne doit donc pas obligatoirement être annexé au bail commercial mais il doit toutefois être mis à la disposition du locataire.

Par ailleurs, certains locaux à usage initial d’habitation peuvent être soumis au statut des baux commerciaux, soit par choix des parties (dès lors que l’option pour le statut des baux commerciaux ne contrevient pas à un autre régime de location impératif), soit parce que les locaux vont être à usage mixte (le bail mixte s’entendant de la location dans un même bail d’un ensemble immobilier comprenant une partie à usage commercial et une partie à usage d’habitation de manière accessoire). En pareil cas, la fourniture de ces diagnostics propres aux immeubles à usage d’habitation redevient une obligation formelle.

Outre ces diagnostics, il peut être imposé également de fournir un état récapitulatif des travaux (article L.145-40-2 du Code de commerce) prévus pour la période triennale à suivre de la prise d’effet du bail et pour la période triennale antérieure s’agissant des travaux réalisés. Cette information là encore a pour but d’orienter le preneur sur la charge de travaux qui pourrait lui incomber en prenant les locaux.

Il convient également pour les bailleurs de bâtiments hébergeant des activités tertiaires dont la superficie totale est égale ou supérieur à 1.000 m² de fournir une attestation numérique annuelle via la plateforme OPERAT évaluant le respect des obligations de réduction de consommation d’énergie (article L.174-1 du code de la construction et de l’habitation).

Rappelons enfin que la loi Grenelle 2, impose pour les baux conclus ou renouvelés depuis le 1er janvier 2012, l’obligation d’inclure une annexe environnementale portant sur des locaux de plus de 2.000 m². Le législateur a mis en place plusieurs obligations tant à la charge du bailleur qu’à la charge du locataire afin d’obtenir une transparence sur les impacts locatifs. Cette annexe doit notamment contenir des informations fournies respectivement par le bailleur et le locataire, afin d’établir un bilan de l’évolution de la performance énergétique et environnementale du bâtiment et des locaux loués.

Nous vous précisons qu’il n’existe à ce jour aucune sanction prévue par les textes de loi et que par conséquent, la sanction en cas de défaut d’établissement de l’annexe environnementale sera laissée à l’appréciation des tribunaux.

Quelles sanctions en cas de non-fourniture des diagnostics par le bailleur ?

L’absence d’information précontractuelle ou une information incomplète sont de nature, en application des dispositions de l’article 112-1 du Code Civil à entraîner la nullité du contrat pour vice du consentement.

En outre, le fait de ne pas annexer l’ensemble des diagnostics expose le bailleur à une amende ainsi qu’à une possible action en responsabilité civile à la demande du locataire pouvant donner lieu à des dommages et intérêts.

Le défaut de mention des renseignements dans l’annonce est passible :

  • Pour les professionnels, d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 € pour une personne physique et 15 000 € pour une personne morale.
  • Pour les non-professionnels, d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 €.

Enfin, le fait de ne pas annexer l’Etat des risques ou de fournir des informations incomplètes peut être de nature à entraîner la diminution du loyer sur demande judiciaire, voire la résolution du bail en application des dispositions de l’article L.125-5 du Code de l’environnement. A noter que l’amende peut aller jusqu’à 300.000 euros et peut être assortie d’une peine de prison de 2 ans.

Nombre de bailleurs, au regard du prix de ces diagnostics envisagent parfois de se dispenser de cette information préalable ou de la différer à un moment où ils seront certains d’avoir signé un bail. C’est un calcul risqué, au regard des éléments que nous vous avons rappelés, car elle peut engager leur responsabilité ou l’annulation du bail. Outre cela, ce défaut d’information peut être par ailleurs de nature à éloigner certains candidats à la location et être ainsi contreproductif.

Ces annexes, comme l’ensemble des éléments à porter dans un bail se satisfont mal d’une absence de conseil préalable et il est très largement recommandé de faire appel à un professionnel des baux commerciaux avant de mettre en place cette relation contractuelle.

A propos de L'auteur

Ambre Camejo

Juriste

Ambre Camejo est juriste au sein d’In Extenso Auvergne Rhône Alpes. Elle accompagne ses clients en droit des sociétés et droit immobilier.

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