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Arrêts de travail : des coûts alourdis pour les employeurs
Date de publication : 11.04.25

Agir pour contenir et prévenir les conséquences de l’absentéisme
Face à l’accroissement des arrêts maladie, les entreprises doivent composer avec des coûts en spirale. Entre gestion administrative chronophage, perturbations dans l’organisation interne et frais liés au remplacement des collaborateurs absents, l’impact économique de l’absentéisme est déjà important. À cela s’ajoute la réduction du plafond de calcul des indemnités journalières de sécurité sociale, couplée à un durcissement des règles de la CPAM concernant les arrêts prolongés de manière discontinue, exacerbant encore davantage le poids financier pour les employeurs.
Le plafond de revenu d’activité retenu pour le calcul des indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS) a été abaissé par un décret du 20 février 2025.
Comme nous le verrons ci-après, cette mesure, effective pour les arrêts de travail débutant à compter du 1er avril 2025, aura pour conséquence une hausse directe et indirecte des coûts pour l’employeur.
Une indemnisation par la sécurité sociale diminuée
Pour les arrêts de travail prescrits à compter du 1er avril 2025, les salariés du secteur privé verront une réduction significative de l’indemnisation des arrêts maladie par la sécurité sociale.
Désormais, les indemnités journalières (IJSS) versées en cas de maladie seront plafonnées à 1,4 SMIC, contre 1,8 SMIC auparavant.

Pour les salariés percevant un salaire brut supérieur à 1,4 SMIC, la diminution des IJSS entraîne une baisse significative de leurs revenus, en particulier en l’absence de maintien de salaire par l’employeur ou de couverture par un dispositif de prévoyance pour incapacité temporaire de travail.
Pour les employeurs, l’évolution du calcul des indemnités journalières se traduit par une augmentation des coûts liés au maintien de salaire, qu’il découle d’obligations légales ou de stipulations conventionnelles.
Par ailleurs, les organismes de prévoyance devront assumer une hausse des indemnisations, ce qui entraînera probablement une répercussion de ces charges sur les cotisations de prévoyance finançant l’incapacité temporaire de travail. Les entreprises doivent donc se préparer à une probable augmentation de leurs cotisations de prévoyance.
Une mesure effective pour les arrêts de travail ayant débuté à compter du 1er avril 2025
Il est précisé par les textes que le nouveau plafond s’applique aux arrêts de travail débutant à compter du 1er avril 2025.
Cette date d’effet emporte les conséquences suivantes :
- Les assurés en cours d’indemnisation au 1er avril 2025 ne sont pas concernés par cette réforme et continuent de bénéficier de l’ancien plafond.
Nous en déduisons, sous réserve de précision réglementaire, que la prolongation suit le régime de l’arrêt initial.
En revanche, en cas de nouvel arrêt de travail ou de prolongation discontinue, le nouveau plafond s’appliquera. - Deux régimes se chevauchent désormais et ce, jusqu’à ce que tous les arrêts ayant débuté avant le 1er avril 2025 prennent fin.

Attention : seuls sont concernés les arrêts de travail pour maladie ordinaire.
Ne sont donc pas concernés par la modification du calcul :
- les IJJSS de maternité, de paternité et d’accueil de l’enfant.
- les IJSS liées aux arrêts de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle.
Illustration de l’incidence de la baisse du plafond de calcul des IJSS :

Illustration de l’incidence sur le montant du maintien employeur :
Prenons l’exemple d’un salarié ayant 1 an d’ancienneté et ayant un arrêt de 30 jours du 1er avril 2025 au 30 avril 2025 (calcul du maintien employeur légal = (salaire x 90%) – (montant des IJSS x 30)

Fin de la tolérance « sécurité sociale » concernant les arrêts de travail prolongés de manière discontinue
Depuis le 1er septembre 2024, les CPAM font une application stricte des règles légales qui conduisent à des pratiques moins favorables pour le calcul des droits à IJSS.
En effet, auparavant, la CPAM appliquait une certaine tolérance qui permettait d’indemniser les jours non couverts entre deux arrêts de travail, notamment pour les weekends et les jours fériés.
En pratique, un salarié en arrêt maladie jusqu’au vendredi, qui se faisait prolonger par son médecin le lundi suivant, était indemnisé entre le vendredi et le lundi (soit pour les jours de week-end).
Depuis le 1er septembre 2024, les périodes non prescrites entre deux arrêts maladie ne sont plus indemnisées par la sécurité sociale ce qui a des conséquences aussi bien sur l’indemnisation du salarié mais également sur le coût du maintien employeur.
La fin de la tolérance de la CPAM implique en effet que les arrêts successifs doivent être considérés comme distincts si la prolongation n’intervient pas à l’expiration de l’arrêt initial. Dans ce cas, un nouveau délai de carence peut s’appliquer au complément légal du par l’employeur.
Or, les employeurs qui assurent la continuité du complément salarial (ce qui correspond à une pratique courante) même en l’absence de versement des IJSS, sont donc directement affectés, puisque cela alourdit le coût réel du maintien de salaire.
Par ailleurs, certaines conventions collectives, prévoyant des conditions spécifiques de maintien de salaire à la charge des employeurs (comme la neutralisation des délais de carence par exemple), peuvent accroître encore davantage les charges patronales liées à ces arrêts discontinus.
Comment maîtriser, voire atténuer, cette hausse du coût patronal de l’indemnisation des arrêts de travail ?
Dans un premier temps, pour maîtriser cette hausse des coûts de l’absentéisme, plusieurs pistes de réflexions sont envisageables à court terme :
- Utiliser le droit d’organiser une contre visite patronale. Cette démarche permet de vérifier la légitimité de l’arrêt de travail tout en s’assurant que les règles établies sont respectées. En plus de contribuer à la prévention des abus éventuels, elle favorise également une gestion plus équitable des absences au sein de l’entreprise.
- En cas d’arrêt de travail prolongé, solliciter le service de santé au travail en vue de suggérer l’organisation d’un rendez-vous de liaison, voire d’une visite de pré-reprise. Cela peut permettre d’éviter qu’un arrêt ne s’éternise et d’envisager dès que possible le retour à l’emploi, les aménagements nécessaires ou, si elle est inévitable, une inaptitude médicale.
- En cas d’application d’un maintien d’origine conventionnelle, une réflexion peut être menée sur l’opportunité de négocier un accord collectif d’entreprise portant sur le maintien employeur en cas d’arrêt de travail pour maladie. Rappelons à cet effet que la conclusion d’un accord implique d’obtenir l’accord des négociateurs et supposera donc de convenir de concessions réciproques.
- Anticiper la hausse des cotisations de prévoyance complémentaire concernant les risques mensualisation et incapacité temporaire de travail et, si cela est pertinent, réduire / encadrer les garanties couvertes, en cohérence avec les stipulations conventionnelles applicables. Il pourra s’avérer nécessaire de revoir l’acte fondateur du régime (DUE ou accord collectif) et/ou de négocier un accord collectif d’entreprise.
Par ailleurs, pour une gestion à plus long terme de l’absentéisme dans l’entreprise, il apparaît essentiel de pouvoir analyser les causes de l’absentéisme, en mettant en place un suivi afin d’identifier les points qui pourraient être améliorés, notamment en termes de conditions de travail ou de prévention.
Cette analyse pourrait permettre par la suite la mise en œuvre de plan d’action pour prévenir l’absentéisme (par exemple en mettant en avant la prévention dans l’entreprise, de renforcer les actions de communication interne, de mettre en place des dispositifs de retour à l’emploi efficaces…).
À propos de L'auteur
Camille Lesne
Manager Conseil Social
Camille Lesné accompagne les chef(fe)s d’entreprise de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur dans les agences d’Aix-en-Provence et Toulon La Farlède. Elle intervient en conseil social, droit du travail et dans la gestion de la paie.
Alexandra Clerc
Manager Conseil Social
Au sein de la Direction Marché Conseil Social et Paie chez In Extenso, Alexandra a notamment pour mission d’assurer une veille technique et réglementaire principalement dans le domaine du conseil social.
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