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Est-ce que le télétravail à 100% est possible ?

Date de publication : 04.11.20

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En cette seconde période de re-confinement national, Emmanuel Macron a déclaré que le télétravail sera « à nouveau généralisé partout où cela est possible ». Ses propos ont ensuite été confirmés par Jean Castex qui a indiqué qu’il faut mettre en œuvre cette forme d’activité « de la manière la plus massive possible ».

Le télétravail est plébiscité

Cette information a immédiatement été relayée par le ministère du travail qui a fait valoir qu’il s’agissait bien ici « d’une obligation » et non « d’une option ». La recommandation est donc : le télétravail à 100% du temps de travail pour toutes les fonctions qui le permettent.

Malgré tout, cela ne signifie pas pour autant que ces injonctions ont force de loi comme l’a rappelé le Conseil d’Etat dans une ordonnance du 19/10/2020 indiquant le caractère non contraignant du Protocole National.

En fait le caractère contraignant de la mise en œuvre du télétravail est antérieur à l’actuelle crise sanitaire et est contenu à l’article L 1222-11 du Code du travail (« Ordonnances Macron » de septembre 2017) qui dispose « qu’en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés »

Alors que le principe général est celui du caractère volontaire du travail (accord de l’employeur et du salarié), nous sommes aujourd’hui, et en fait depuis le début de la crise sanitaire, dans le cadre d’une exception prévue par la loi.

Oui, donc, l’employeur peut imposer 100% du temps de travail en télétravail à l’ensemble de son personnel. La conséquence immédiate est que le refus du salarié de se soumettre à « cet aménagement du poste de travail » est constitutif d’une faute disciplinaire de nature à entrainer la rupture du contrat de travail.

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Le recours massif au télétravail ne peut être une obligation absolue

Néanmoins, le chef d’entreprise qui est le seul responsable du bon fonctionnement n’est pas lui-même soumis à l’obligation absolue de mettre ses salariés en télétravail.

Cette responsabilité qui fonde le pouvoir de subordination (et donc l’existence même du contrat de travail) s’accompagne d’un devoir qu’il faut impérativement respecter et qui est l’obligation « de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » (article L 4121-1 du code du travail).

Le 100% télétravail n’est donc pas obligatoire mais sous la réserve de strictement respecter à minima les 4 principes ci-après :

  1. La liste limitative des postes/fonctions/tâches incompatibles avec le télétravail doivent être déterminées précisément (courrier, réception de clients/fournisseurs, logiciels spécifiques non adaptés à un accès simplement domestique, …).
  2. Une organisation du travail conforme aux préconisations du Protocole National doit être adoptée en conséquence (« …afin de limiter les interactions sociales »).
  3. Si le poste est éligible au télétravail, il est nécessaire d’en motiver le refus, avec l’obligation « d’apprécier de façon approfondie les risques potentiels auxquels un refus peut exposer le salarié» (Questions/Réponses du Ministère du travail du 22 octobre 2020).
  4. S’entourer des conseils et préconisations de la médecine du travail.

Dans ce contexte particulièrement anxiogène pour les salariés comme pour le chef d’entreprise, l’employeur doit avoir en tête deux principes fondamentaux pour agir et anticiper :

  • Etre en mesure de pouvoir justifier (avec tout le traçage nécessaire) que l’entreprise a bien respecté les consignes générales et en particulier celles contenues dans le Protocole National. C’est cette « bonne foi» dans l’exécution du contrat de travail (article L 1222-1 du code du travail) qui lui permettra de se protéger efficacement de toute mise en cause ultérieure (recherche d’une faute inexcusable suite par exemple à des contaminations sur le lieu de travail, …).
  • Privilégier le dialogue social avec tous les partenaires au sein de l’entreprise (le personnel, le CSE, le médecin du travail, …) pour maintenir et surtout entretenir la communauté de travail sans laquelle il n’est pas d’entreprise viable.

Appliquer au télétravail, ces principes directeurs serviront aussi, mais peut-être seulement dans un second temps une fois l’urgence sanitaire passée, à repenser une nouvelle organisation du travail pérenne et réglant les multiples questions pratiques et en suspens (effectivité de la déconnexion, maintien du lien social, frais exposés, conditions de travail à domicile, …) en tirant les leçons des évènements actuels et de l’expérience acquise.

A propos de L'auteur

Pierre-Jacques Castanet

Avocat à la cour, spécialisé en droit du travail

Pierre-Jacques Castanet dirige le Département droit social du cabinet In Extenso Avocats d’Ile de France. Il est spécialisé en droit du travail et de la protection sociale.

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